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Une interview dans le journlal de Reims Oreille

Reims Oreille, Tout d'abord pourquoi Petrek ?

Petrek : Si tu parles du nom, c’est un jeu qui date d’il y a 30 ans. Avec des amis de « 30 ans », on s’amusait à se filer des pseudos… Ben, voila, moi c’est Petrek. Patrick Perret.Si tu parles du fait de prendre un pseudo

pour avancer dans cette grande aventure de la création, je ne sais pas trop. Peut-être pour mettre de l’air sous les pieds du petit bonhomme que je suis, peut-être pour être dans un rapport ludique à la création. C’est un peu comme Peter Pan, sans doute le refus d’une réalité trop triste, trop exigüe. Le désir de laisser pousser ses propres ailes pour prendre de la hauteur… Bref, pour mieux respirer ? C’est aussi, sans doute, une manière de s’inventer…


R.O. : Tu fais de la chanson tout public et tu es chanteur jeune public ! Tu peux nous expliquer ?


Petrek : D’abord, j’écris avec un plaisir immense depuis de très nombreuses années. Je prends un pied pas possible quand je suis attablé à mes crayons. Alors, que j’écrive pour le Jeune Public ou pour les Vieux comme nous, c’est pareil, je recherche toujours la satisfaction de ce plaisir qui me pousse à m’asseoir à la table des mots. Je crois que je m’adresse toujours, dans mes chansons, à la même personne : moi. J’essaie de me plaire, de me séduire, de me rendre un peu plus intelligent. Qu’il s’agisse de l’un ou de l’autre public, je m’adresse, comme Bernard Moitessier dans son « Tamata et l'alliance" au môme qui était là et qui reste là en essayant de ne jamais le décevoir...

C’est pas toujours simple, mais c’est essentiel pour moi ! Et puis, une chanson Jeune Public réussie est une chanson tout public. J’en ai ras le corgniolon de ces frontières de commerçants. On peut, je pense, prendre son pied avec un disque pour les mômes quand on a notre âge canonique !Non ? Sauf si la chanson est bêtifiante, mais c’est la même chose pour la chanson tout public ! Donc, jeune ou pas jeune, le temps ne fait rien à l'affaire...

Pis regarde Prévert : jeune ou vieux public ?

Pis regarde Lemarque, Perret, Lapointe, Wally, Nougaro. Quand une chanson est réussie, y a plein d’entrées possibles. Pis y a des dicos à la disposition des familles, des mômes. Mais c’est vrai qu’on est un peu cerné par la chanson Fast Food ou Mac Daube, comme dirait un pote à moi, je veux dire la chanson qu’on doit ingurgiter rapidement et dont tu te réveilles encore affamé un quart d’heure après ! J’ai toujours préféré les repas gastronomiques. Bon, alors mon boulot, c’est d’essayer d’être sincère.


R.O. : Un vieux public, c’est quoi ?


Petrek : C’est nous aujourd’hui. Sauf que nous, on fait des efforts pour rester le môme qui a fait socle ! Un vieux ronchonne, une vieille cochonne et moi, j’adore la charcuterie ! (Cette phrase estconne mais c’est celle qui me vient…)


R.O. : Quel est le lien entre les chansons de Ma Bonne Suzanne et leur univers Gabin-Belmondo et celles d’Une Valise dans la Tête et leur univers Prévert-Satie?


Petrek : L’auteur, le compositeur, l’interprète…et le souhait de foutre du vent dans ses godasses!

R.O. : Peut-on dire que tu fais de la « chanson engagée jeune public » ?


Petrek : Y en a qui le disent. Moi je n’en sais rien. J’écris, je compose avec ce que je suis dans la vie…


R.O. : Comment écrit-on des chansons jeune public ?


Petrek : Comme on fait du vélo. D’abord on se casse la margoulette, puis on arrive à tenir sur quatre roues, puis deux. Puis avec beaucoup de

pratique (pour les laborieux comme moi), on finit par agrandir la boucle et même à franchir quelques cols. Bon, tu auras compris que j’aime le vélo, mais plus sérieusement, je n’en sais rien, je pense que chacune, chacun a ses habitudes. Moi, je ne fais pas de différence entre Chanson Jeune ou Tout Public. Si, peut être l’angle d’attaque, le point de vue sur les sujets traités qui changent... Et puis aussi, je crois que je me bats dans mes chansons, disques, spectacles en direction du Jeune Public pour que l’aventure soit toujours, au final, assez positive. On ne doit pas désespérer les mômes. Mais ça ne veut pas dire que je m’abstiens de «chanter la mort » ou la douleur.

Les mômes sont intelligents, ce sont bien souventles vieux cons qui les réduisent ensuite comme on réduit une fracture. Sauf que cette fracture-là est nécessaire à la poésie, je crois….

R.O. : Et la musique dans tout ça ?

Petrek : J’ai souvent des bouts de mélodies dans ma besace, alors quand celles-ci rencontrent les mots, le tour est joué. Après, le boulot consiste à trouver la plus belle robe, le plus beau décolleté à ces chansons et ça, ce sont les arrangements.On n’insiste jamais assez sur le travail d’arrangement.C’est un exercice très difficile que je serais bien incapable d’effectuer seul. Là j’ai besoin des autres et ce travail est bien souvent collectif.

Il arrive aussi, que certains textes s’acoquinent avec les notes d’autres collègues de bureau ! Laurent Darmon.Malhory Maret, Thibaut Martin...

D’ailleurs, je lance un appel à qui veut, je suis fin prêt pour écrire et proposer des textes à d’autres collègues qui pourront mettre en musique et mieux encore, les chanter. Faut pas hésiter à me contacter parce que c’est en croisant le FAIRE qu’on FORGE les lendemains meilleurs !!


R.O. : « Les notes font danser les mots » : qui vient d’abord, la note ou le mot ?


Petrek : C’est comme une belle rencontre au baloche, y a les deux protagonistes : le gars, la fille (ceci dit j’ai rien contre les rencontres du même sexe, mais bon, c’est pour faire simple). Ils sont arrivés à l’heure, l’ordre d’arrivée importe peu, bref, ils sont là, tous les deux et c’est une évidence quand les regards se croisent. Tu les retrouve quarante ans plus tard au club du troisième âge amoureux main dans la main…


R.O. : Trénet pour l’univers, Utgé-Royo pour la voix,Prévert pour la poésie, Nougaro pour le rythme, Lavilliers pour le rock latino, Led Zeppelin et Django pour les guitares, Satie pour le piano : ça te va?


Petrek : Cornegidouille, mais c’est une tablée plus que réjouissante que tu me proposes là. Je signe de suite pour une bouffe avec ces artistes-là. Pour ce qui me concerne, je choisis le vin parce que, comme tu le sais

j’ai arrêté l’alcool .. je ne bois que du Vin ! Et puisque que tu parles de références, quelques cailloux blancs sur mon chemin à qui je réserve une place à table à leur côté : Gotainer, Vassiliu, Sting,Renaud, Edgard Ravahatra, Fauré, Barbara, Couture, Brel, Davy, Desjardins, Sicard, Higelin, Wally, Vincent, Rocca, AC/DC, Gilles Vigneault, Marley, Sheller, Marie-Paule Belle, Annegarn, Le Forestier, Art Mengo...

Quand est-ce qu’on le fait ce banquet ?

R.O. : Est-ce que la chanson jeune public est plus facile que l’autre chanson ?


Petrek : Non. Il faut tordre le coup à cette idée reçue ! Monter un spectacle en direction du Jeune Public est pour moi beaucoup plus difficile. Une salle de 350 mômes, c’est pas de la tarte !

C’est un public difficile qui n’a pas les codes, qui n’est pas là pour te faire plaisir. Si ça lui convient, c’est un bonheur sans nom. Si quelques-uns décrochent ou décident de tout envoyer balader, c’est la guerre mondiale nucléaire,un tsunami… Lors d’un spectacle devant des adultes, tu es beaucoup plus tranquille, tu peux prendre le temps de mener l’émotion. Ils sont polis. S’ils n’aiment pas, ils se tirent à la fin, en douce. Mais le jeune public te le fait savoir sur l’instant. Il faut donc avoir ça en tête lors de la construction du spectacle. Pour ce qui est du disque, c’est autre chose. Je ne souhaite pas m’abstenir d’aller là où je veux. Il n’y a qu’à écouter le dernier « Une Valise dans la tête » pour s’en rendre compte. Un piano/voix où le temps prend son temps.

On a eu la chance, pour cette aventure, de recevoir le coup de coeur de l’Académie Charles Cros et un superbe mot de Gérard Hautelain. Ceci dit, chaque CD, chaque spectacle est une aventure à part entière même si, comme le dit Vigneault, à la fin, «le chemin est celui qui mène à soi ! »

R.O. : Le coup de coeur de l’Académie Charles Cros, ça représente quoi ?


Petrek : Pour moi, c'était d'abord une belle surprise, comme le père noël qui vient déposer ses papillotes dans tes chaussons, ça donne des ailes pour continuer la route, des couleurs au travail qu'on fait chaque jour. C'est une espèce de balise aussi, ça met un éclairage particulier. C'est quand même aussi une reconnaissance de la qualité du travail effectué. C'était aussi un vrai plaisir que ce coup de coeur soit décerné à ce disque qui est vraiment, je pense, un projet particulier. Ce n'était pas aller dans le sens du poil que de faire, aujourd'hui, un piano/voix pour le Jeune public. « Unevalise dans la tête », j'ai vraiment aimé faire ce disque. J'ai plein d'autres projets avec des formules musicales très différentes.

C'est la diversité des rencontres et des projets qui m'aide à avancer dans mon bazar !

www.petrek.fr/